[Conseil Municipal] Notre prise de parole sur le projet de fusion CHU Poitiers et GHNV Châtellerault

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Le lundi 12 octobre 2020, lors d’un conseil municipal extraordinaire, les élu·e·s de Poitiers Collectif devaient se prononcer sur le projet de fusion entre le CHU de Poitiers et le Groupe Hospitalier de Nord Vienne (qui regroupe le centre hospitalier de Loudun, celui de Châtellerault et un EHPAD). Julie Reynard et Aloïs Gaborit, co-président·es du groupe, ont pris la parole pour exposer notre position commune sur le sujet.

Le conseil municipal doit donner un avis consultatif au projet de fusion entre le CHU de Poitiers et le GHNV de Châtellerault

 

« Aujourd’hui, il nous est demandé de nous positionner sur le projet de fusion entre le Centre Hospitalier Universitaire de Poitiers et le Groupe Hospitalier Nord Vienne. Tout d’abord, nous souhaitons rappeler la philosophie qui guide l’action de Poitiers Collectif : faire confiance et faire avec. Et non pas, dans une logique de posture, aller contre, annihilant ainsi toute possibilité d’échanges et de discussions. À ce titre, nous souhaitons remercier Madame la Directrice. Merci d’être venue à notre rencontre et d’avoir pu apporter vos réponses à nos questions.

Le Groupe Hospitalier de Nord Vienne est un acteur majeur du territoire châtelleraudais, avec 1352 agents dont 77 médecins, 726 lits, 921 naissances en 2018. Depuis les 20 dernières années, le territoire châtelleraudais n’a pas été épargné par les suppressions gouvernementales de service public avec par exemple la fermeture emblématique de l’école de gendarmerie en 2009 qui a laissé un grand vide dans la ville notamment en terme d’emplois. Aujourd’hui, la disparition du pôle hospitalier n’est tout simplement pas envisageable.

En lisant le rapport qui nous a été transmis, nous comprenons que la situation financière du GHNV ne lui permettra pas, en cas de non-fusion, de continuer sa mission de service public hospitalier de proximité. A fin 2018, son bilan était déficitaire de 11 millions d’euros. Seule la direction commune de l’établissement engagée avec le CHU de Poitiers a permis un redressement de la situation en 2019 ; moyennant d’une part des facturations différées de la part du CHU pour près de 4 millions d’euros et du matériel mis à disposition pour 450 000 euros. Ces mesures ne peuvent être que temporaires.

Les directions des deux centres hospitaliers ont déjà amorcé le processus de fusion dès 2018 pour une finalité en janvier 2021. Dans cette optique, certaines activités ont déjà été mises en commun : urgences, biologie et département d’information médicale. La direction du CHU assure la direction des ressources humaines du GHNV depuis novembre 2018. D’ores et déjà, la paie, la retraite, la protection sociale des agent·es non-médicaux ont été harmonisées. Les prévisions réalisées ont montré que le CHU avait la stabilité financière nécessaire pour absorber, avec le concours de l’ARS, la dette du GHNV sans compromettre l’avenir de la nouvelle entité.

Nous comprenons donc qu’à ce stade la décision a déjà été enclenchée. Les mesures appliquées par la direction commune depuis 2018, ainsi que les réponses apportées par Madame la directrice générale sont de nature à donner des gages de confiance comme l’amélioration et la diversification de l’offre de soins à Châtellerault avec le recrutement de nouveaux postes. Nous pensons également à la l’harmonisation par le haut des délais d’attente avant CDI et à l’amélioration des modalités d’accueil des internes. Enfin, il apparaît clairement qu’un établissement fusionné saura attirer plus facilement des équipes de recherche importante et des professionnels qualifiés sur des spécialités recherchées.

De façon plus générale, nous tenons à exprimer notre inquiétude face à la gestion globale de la santé en France visant à faire de l’hôpital une entreprise rentable à la productivité accrue, avec toujours moins de moyens et moins de personnels. Cette politique publique fondée sur la rentabilité des soins ne jure que par l’ambulatoire au détriment de l’hospitalisation longue, trop longue car trop coûteuse. Cette politique publique cherche à réduire ou à optimiser le nombre de lits, et nous dit qu’il faudrait être malade moins longtemps car cela coûte moins cher.  Cette politique publique met le personnel soignant sous pression, l’épuise et n’est pas en mesure de lui offrir des conditions de travail à la hauteur des enjeux.  Et c’est bien cette politique publique qui a montré ses faiblesses avec la gestion que nous avons connu avec la crise COVID, démontrant ainsi l’inefficacité de cette vision capitaliste du système de santé.

Nous sommes bien conscient·es que l’objet de ce vote n’est pas de cautionner ou rejeter une politique nationale, mais bien de répondre à une situation précise, locale, territoriale, autant qu’à une nécessité économique réelle : sans fusion, le GHNV ne pourra se maintenir. Dans une volonté de reconstruire un lien fort entre Poitiers et Châtellerault, nous, élu·es du groupe Poitiers Collectif, avons décidé en responsabilité de donner un avis favorable à la fusion entre les deux établissements.

Néanmoins, comme nous le disions en préambule, Poitiers Collectif dès sa construction a fait le choix de la concertation, du faire avec et de faire confiance à ceux qui ont les compétences pour avoir un avis éclairé. Nous ne désirons donc pas nous exprimer par des postures, à la place de ceux qui savent. C’est pourquoi, tout en étant vigilant au respect du travail de conseil de surveillance et des principes écrits dans la présente délibération, nous souhaitons la création d’un groupe d’appui à la maire constitué d’élu·es volontaires de Poitiers voire des autres communes. L’idée est de sortir de la délégation pure du pouvoir de ce conseil municipal à la maire dans son rôle de présidente du conseil de surveillance, mais bien de pouvoir, collectivement, apprendre, comprendre et interroger en toute liberté experts et personnalités qualifiées afin d’obtenir des éclairages sur l’avancée de la création du nouvel établissement hospitalier.

Nous sommes déterminé·es à suivre de près, représentés par notre maire qui siègera au Conseil de surveillance, son déroulé et ses conséquences sur les plans écologique, économique et social. Nous sommes persuadé·es que sur nombre de ces sujets, nous pouvons avancer ensemble, dialoguer en confiance et faire en sorte que la fusion soit une réelle réussite. Il en va de notre santé et de celle de notre territoire. »